| AFFAIRER (S'), verbe pronom. [Le suj. désigne des êtres vivants, avec indication fréq. d'un lieu ou parfois du voisinage d'une pers. (prép. : à, dans, autour, devant, etc.)] Faire montre d'empressement dans son travail et, le cas échéant, d'agitation : 1. Et la vie continuait, dans l'antique atelier, toujours pareille et régulière, comme si les cœurs, un moment, n'y avaient pas battu plus vite. Tandis qu'Hubert s'affairait aux métiers, dessinait, tendait et détendait, Hubertine aidait Angélique, toutes les deux les doigts meurtris, quand venait le soir.
É. Zola, Le Rêve,1888, p. 157. 2. Une lampe sur la table dehors, le feu de la cuisine dans la maison, le tic-tac de la pendule marquaient seuls la pulsation du grand calme un peu oppressant. Puis des gens s'affairèrent pour nos commissions; ...
Alain-Fournier, J. Rivière, Correspondance,lettre de A.-F. à J. R., sept. 1908, p. 50. 3. La confusion devint générale, et, tandis que certains s'affairaient auprès de la présidente, qui continuait à gesticuler en poussant des glapissements aigus, d'autres entouraient Dhurmer qui criait : « Il ne m'a pas touché! Il ne m'a pas touché!... »
A. Gide, Les Faux-monnayeurs,1925, p. 1174. 4. Un médecin du quartier se tenait au chevet de MmeDuffieux qui gémissait ainsi, tandis qu'une vieille femme au ventre énorme, peut-être une parente, peut-être une voisine, s'affairait autour du fourneau.
G. Simenon, Les Vacances de Maigret,1948, p. 92. 5. Entrant par une petite porte latérale, les deux garçons se trouvèrent dans une vaste cuisine où s'affairaient plusieurs femmes en tabliers blancs.
J. Green, Moïra,1950, p. 196. 6. Le Redoutable était à quai, ses ponts débarrassés de leur habituel désordre; des hommes s'affairaient auprès du tas de charbon.
J. Gracq, Le Rivage des Syrtes,1951, p. 197. 7. « C'est arrivé : me voilà étudiante! » me disais-je joyeusement. Je portais une robe écossaise, dont j'avais cousu moi-même les ourlets, mais neuve, et taillée à ma mesure; compulsant des catalogues, allant, venant, m'affairant, il me semblait que j'étais charmante à voir.
S. de Beauvoir, Mémoires d'une jeune fille rangée,1958, p. 171. − S'affairer à + inf. ou subst. d'action.Être très occupé à : 8. Aux fenêtres des roulottes, les forains regardaient, attendant l'heure. Certains s'affairaient encore à la toilette de leurs boutiques.
L. Aragon, Les Beaux quartiers,1936, p. 161. 9. ... un vilain, poussant son âne, passa un jour, dans la ville où il était venu vendre une charge de bois, devant la boutique d'un marchand d'épices, dont les valets s'affairaient à piler dans des mortiers leurs herbes et leurs graines odorantes : en respirant ces précieux parfums, qui agissent sur lui comme un air maléfique, il tombe raide à terre, évanoui; ...
E. Faral, La Vie quotidienne au temps de saint Louis,1942, p. 120. 10. ... les hommes s'affairaient à plier les toiles de tente, à rouler les couvertures.
J.-P. Sartre, La Mort dans l'âme,1949, p. 220. − Rare. S'affairer de qqc. (à propos de qqc.).Être très préoccupé de. Synon. se faire (toute) une affaire de qqc. : 11. L'échec a, lui aussi, ses prédestinés : ils ne gardent jamais le souvenir que de ce qu'ils ont manqué ou souffert; ils s'affairent des difficultés de leurs entreprises avant même qu'elles ne s'offrent à eux; ...
E. Mounier, Traité du caractère,1946, p. 451. Rem. Le verbe, comme l'adj. affairé, a sans doute désigné d'abord des activités serviles ou matérielles comme celles qui sont confiées à des domestiques, à des intendants (cf. les ex. d'A. Daudet, d'É. Zola, etc.). De là sans doute la note péj. qui parfois s'attache au mot, qui est tout à fait sorti de ses humbles origines (cf. étymol. et hist.) dans l'ex. 7. Ac. t. 1 1932 l'ignore encore. Prononc. − 1. Forme phon. : (s'-) [afε
ʀe] ou [-fe-], (je m'-) [afε:ʀ]. Harrap's 1963 transcrit la 2esyllabe de l'inf. avec [ε] ouvert, Pt Rob. avec [e] fermé. Warn. 1968 réserve la prononc. avec [ε] ouvert au lang. soutenu et la prononc. avec [e] fermé au lang. cour. Enq. : /afe2
ʀ/. Conjug. parler. 2. Dér. et composés. − Affair- : affairage, affaire, affairé, affairement, affaireusement, affaireux, affairisme (cf. Lar. encyclop.), affairiste. Cf. faire. Étymol. ET HIST. − 1888, supra.
Formé sur affairé*, pris à tort pour un part. passé. Le mot pourrait être d'orig. dial. (FEW t. 3 s.v. facere), de là être passé dans l'usage pop., puis fam., enfin dans la lang. cour. STAT. − Fréq. abs. litt. : 86. BBG. − Bailly (R.) 1969 [1946]. − Bar 1960. − Bél. 1957. − Bénac 1956. − Boiss.8. − Dup. 1961. − Thomas 1956. |