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ADULTÈRE1, adj. et subst.
I.− Emploi adj.
A.− Qui viole la foi conjugale.
1. [En parlant de pers.] :
1. − « Mais ajoutez », dit la princesse, « que vous vous êtes délectée à l'énoncé de ces péchés, il vous dira : ma sœur, ces péchés sont les vôtres. » − « Alors », conclut Mme de Trinquetailles, « en une heure nous avons été fornicatrices, adultères, incestueuses, stuprueuses, sacrilèges, molles, sodomites et bestiales? » J. Péladan, Le Vice suprême,1884, p. 240.
2. kasandra. − Je ne puis. Il faut entrer, il faut que la Chienne adultère [Clytemnestre] Près du Maître dompté me couche contre terre. Ch.-M. Leconte de Lisle, Poèmes tragiques,Les Érinnyes, 1886, p. 193.
P. méton., rare. [En parlant d'un enfant] Qui est né d'un adultère. Synon. adultérin :
3. andromaque. − Si Hector n'était pas mon mari, je le tromperais avec lui-même. S'il était un pêcheur pied bot, bancal, j'irais le poursuivre jusque dans sa cabane. Je m'étendrais dans les écailles d'huître et les algues. J'aurais de lui un fils adultère. J. Giraudoux, La Guerre de Troie n'aura pas lieu,1935, I, 6, p. 58.
P. ext., rare, littér. [En parlant d'un animal] :
4. Il revenait de sept huit années en arrière et le voilà maintenant (...) président de la république de Costa Rica (par révolution), président de la république de Guatemala (par occupation), il oublie maintenant l'ambition, il y a tant d'autres possibles, triumvir, uhlan, plombier, tétrarque, rétiaire, schah, faux saulnier, éléphant blanc (par transformation magique), sauterelle adultère, peplum chinois, morceau de sucre, bout de savon fondant. R. Queneau, Loin de Rueil,1944, pp. 141-142.
Rem. 1. Le compl. de l'adj. est d'ordinaire intr. par la prép. avec pour indiquer le ou la partenaire de l'adultère (cf. E. et J. de Goncourt, Journal, août 1873, p. 941 : ,,Madame Hugo adultère avec son gendre.``). Except. on rencontre la prép. à pour désigner la (ou le) partenaire d'un adultère à laquelle (ou auquel) on est infidèle (cf. L. Bloy, Journal, 1898, p. 273 : ,,... vous ne pouvez me tendre la main sans devenir adultère [au fig.] à quelque démon.`` [Lettre à Rachilde]). 2. Syntagme très fréq. : femme adultère (R. Martin du Gard, Les Thibault, t. 2, 1923, p. 849; etc.), d'origine sans doute biblique (cf. Évangile selon St Jean, VIII, 3-4).
2. [En parlant de l'union entre pers. adultères] Commerce, amour adultère. (Ac. 1798-1932) :
5. Pas un mot ne devait laisser supposer qu'ils eussent jamais parlé d'amour. S'il avait à se justifier, c'était seulement d'avoir pu par vertu condamner une liaison adultère. J. Guéhenno, Jean-Jacques,Roman et vérité, 1950, p. 214.
Rem. Les qq. syntagmes cités dans les dict. apparaissent dans la docum., mais avec une faible fréq. : commerce adultère (A. Thierry, Récits des temps mérovingiens, t. 2, 1840, p. 141); désirs adultères (G. Flaubert, Madame Bovary, t. 1, 1857, p. 124).
P. anal., HORTIC. [Se dit de l'action simultanée des poussières séminales d'espèces différentes] :
6. Il n'y a pas de doute qu'en semant les pepins provenant de ces fécondations adultères, on n'obtienne beaucoup de nouvelles variétés. Morogues (La Châtre t. 1 1865).
B.− Au fig.
1. Dans la lang. biblique. [D'apr. l'Ancien Testament, où Israël est considéré comme l'épouse de Dieu]
a) [En parlant d'une famille, d'une race, d'un peuple] Qui viole la fidélité à la vraie religion, idolâtre :
7. − Quoi! ce sont ses miracles qui vous le font tenir pour divin! quoi! vous aussi, pour croire en lui vous avez besoin d'un miracle? comme la « foule méchante et adultère » qui disait : « Maître, nous voudrions voir un signe de vous. » A. Gide, Journal,1916-1919, p. 601.
b) [En parlant d'une attitude relig.] Même sens :
8. Moïse ne guérit Israël de son adultère idolâtrie, qu'en lui faisant boire la cendre du serpent d'airain. J. Michelet, Histoire romaine,t. 2, 1831, p. 327.
2. Dans le style relig., poét. ou oratoire. [Se dit d'un inanimé] Qui offre un mélange vicieux, impur. Synon. adultéré :
9. La voix qui crie Alla! la voix qui dit mon Père, Lui portent l'encens pur et l'encens adultère : À lui seul de choisir. A. de Lamartine, Harmonies poétiques et religieuses,1830, p. 313.
10. Cette terre est en ruines; ses montagnes s'effritent en pierrailles, la pensée y est toute pleine d'éléments syriaques et d'hellénisme adultère, des débris qui se sont échappés des grands temples antiques du soleil. M. Barrès, Mes cahiers,t. 10, 1913-1914, p. 379.
II.− Emploi subst. Personne adultère :
11. Alors nos théâtres cesseront d'être des écoles d'infidélité pour les femmes et d'immoralité pour les hommes, lorsque nous en aurons banni toutes ces vertueuses adultères et tous ces honnêtes indigents qui n'apprennent qu'à tromper la couche nuptiale et à voler son voisin. F.-R. de Chateaubriand, Fragments du Génie du Christianisme primitif,1800, p. 223.
12. On n'apprendra pas son nom [d'un saint qui n'est pas un grand pécheur] aux petits enfants qui vont en classe, puisque l'attention de ces âmes pures, par un louable souci de réalisme, est attirée uniquement sur les voleurs, les assassins, les adultères, les concubinaires, et pire encore : les personnages de Shakespeare et de Racine. R. Brasillach, Pierre Corneille,1938, p. 207.
P. anal. [En parlant d'un animal] :
13. Quelque adultère s'est donc glissé dans la corolle qui sert de grotte à la nymphe. A. Karr (Besch. 1845).
Étymol. ET HIST. − Fin xiies. adulteire « celui ou celle qui viole la foi conjugale » (St Bernard, Sermons ds Gdf. Compl. : li adulteires David). Fém. adulteresse 1535 (Calvin, Bible françoise, Epistre de Jacques, 4 ds Hug.). 1752 (Trév. : Adulteresse... Il est facheux que ce mot ne soit pas françois, et que nous n'ayons qu'adultère pour signifier tout à la fois et le crime d'infidélité conjugale et le mari et la femme qui le commettent. Les Latins, qui ont un mot pour chacune de ces choses, sont bien mieux partagés que nous de ce côté-là). Empr. au lat. adulter, adj. « id. » (dep. Plaute, Amphitryon, 1049 ds TTL s.v., 879, 83 : sive uxorem sive adulterum). Forme sav. pour le pop. avoutre, xiiies. (Bible, Richel. 901, fo13a ds Gdf. : Enfans d'avoltres).
BBG. − Bél. 1957. − Boiss.8. − Lav. Diffic. 1846.