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-AIN1, -AINE, suff.
Suff. formateur d'adj. (gén. substantivables) à partir de topon. ou de subst. et qui signifie l'idée d'orig.
I.− [La base est un topon.] Le suffixe signifie « qui est de »
A.− [La base est un nom de localité] :
barcelonnettain « de Barcelonnette »
belfortain « de Belfort »
briouzain « de Briouze »
castelpontain « de Pont-du-Château »
chapelain « de La Chapelle-Saint-Luc »
chartrain « de Chartres »
constantinopolitain « de Constantinople »
génovéfain « de Sainte-Geneviève-des-Bois »
levrosain « de Levroux »
montacutain « de Montaigu »
montpelliérain « de Montpellier »
motterain « de La Motte-Servolex »
mussipontain « de Pont-à-Mousson »
napolitain « de Naples »
pétrifontain « de Pierrefonds »
rambolitain « de Rambouillet »
romain « de Rome »
romeufontain « de Font-Romeu »
saint-pierrain « de Saint-Pierre-d'Albigny »
samaritain « de Samarie »
syracusain « de Syracuse »
théopolitain « de Villedieu-les-Poêles »
toulousain « de Toulouse »
trinitain « de Sainte-Trinité-sur-Mer », etc.
B.− [La base est un nom de pays] :
africain « d'Afrique »
américain « d'Amérique »
marocain « du Maroc »
mexicain « du Mexique »
roumain « de Roumanie »
C.− [La base est un nom de région] :
aquitain « d'Aquitaine »
armoricain « d'Armorique »
aubain « de l'Aubagne »
bocain « du Bocage normand »
germain « de Germanie »
lorrain « de Lorraine »
rifain « du Rif »
tibétain « du Tibet »
D.− [La base est un nom d'île] :
cubain « de Cuba »
dominicain « de Saint-Domingue »
jamaïquain « de la Jamaïque »
portoricain « de Porto-Rico »
II.− [La base est un nom commun]
A.− Le suffixe signifie « qui est de » ou, plus généralement, « qui est relatif à ..., qui a rapport à... »
1. [La base est un nom commun de lieu] :
diocésain « qui est du diocèse; relatif au diocèse; habitant du diocèse »
métropolitain « de la métropole » (« ville » ou « pays-mère »); « qui a rapport à la métropole »
républicain « relatif à la république; celui qui est partisan de la république, qui lui est favorable »
riverain « qui se trouve le long d'une rive; personne qui habite près d'un cours d'eau, d'un lac, d'une place, d'une rue, etc. »
sylvain « divinité des forêts »
ultramontain « qui est relatif au pouvoir central de l'Église romaine établi en Italie; qui adopte les positions de ce pouvoir »
urbain « qui est de la ville, des villes »
2. [La base n'est pas un nom commun de lieu et n'est pas toujours sentie] :
contemporain « qui appartient à l'époque de..., qui est de la même époque que... »
élisabéthain « qui appartient au règne de Élisabeth Ire»
germain « qui appartient au même sang »
humain « qui appartient à la nature de l'homme »
Rem. Certains emplois adj. n'impliquent plus l'idée d'orig. et l'adj. est rattaché à un subst. en -ité : humain « qui fait preuve d'humanité », mondain « qui aime les mondanités », urbain « qui fait preuve d'urbanité » (Pt Rob.)
B.− Le suffixe signifie, outre l'origine, une certaine fonction ou un état social
1. [La base désigne un lieu] :
chapelain « prêtre qui dessert une chapelle »
châtelain « seigneur d'un château; celui qui possède un château, qui y réside »
forain « marchand ambulant, qui s'installe sur les foires et sur les marchés »
sacristain « celui qui est préposé à la sacristie, à l'entretien de l'église »
vilain (< villa) « paysan libre, au Moyen-Âge, habitant d'une ferme »
2. [La base n'est pas un nom commun de lieu et n'est pas toujours sentie] :
aubain « étranger qui n'est point naturalisé et qui est sujet au droit d'aubaine » (Littré)
écrivain « personne qui compose des ouvrages littéraires »
publicain « chacun des riches chevaliers romains qui prenaient à ferme le recouvrement des impôts » (Rob.)
souverain « qui est au dessus des autres; qui n'est subordonné à personne; qui possède la souveraineté »
suzerain « seigneur qui est au dessus des autres seigneurs »
Cf. aussi, uniquement masc. :
parrain « celui qui patronne un enfant dans la cérémonie du baptême »
Cf. aussi, uniquement fém. :
cheftaine, -
marraine .-
C.− Le suffixe signifie « qui appartient à une collectivité religieuse » :
dominicain « de l'ordre de saint Dominique »
franciscain « de l'ordre de saint François »
olivétain « moine de l'ordre du Mont-Olivet »
puritain « membre d'une secte de presbytériens rigoristes »
Morphol. − Var. morphol. de la base et élargissement du suff. A.− Le suff. -ain [ε ̃] se combine princ. avec les consonnes finales [t], [k], [z], [ʀ], [l] 1. Consonne finale [t] a) [t] est la consonne finale prononcée de la base : barcelonnettain (Barcelonnette), huelgoatain (Huelgoat), lauzertain (Lauzerte), voultain (La Voulte) Cf. aussi avec var. vocalique de la pénultième : élisabéthain (Élisabeth) b) [t] correspond au graphème final -t non prononcé de la base (consonne latente) : beaufortain (Beaufort), belfortain (Belfort) Cf. aussi avec var. de la voyelle finale : murétain (Muret), olivétain (Mont-Olivet), saint-bonnitain (Saint-Bonnet) c) [t] est la consonne finale de la var. sav. ou pseudo-sav. de la base -font- : bellifontain (Fontainebleau), combellifontain (Combeaufontaine), pétrifontain (Pierrefonds), romeufontain (Font-Romeu) -mont- : romarimontain (Remiremont), ultramontain (d'Outremonts) (Littré) -pont- : castelpontain (Pont-du-Château), gibaldipontain (Pontgibaud), maxipontain (Pont-Sainte-Maxence), mussipontain (Pont-à-Mousson), rudipontain (Pont-de-Roide), spiripontain (Pont-Saint-Esprit), vincipontain (Pont-Saint-Vincent) -polit- : carlopolitain (Charleville), carolipolitain (Charleville), carolopolitain (Charleville), constantinopolitain (Constantinople), gratianopolitain (Grésivaudan), masopolitain (Masevaux), métropolitain (Métropolis), paulopolitain (Saint-Paul-sur-Ternoise), persépolitain (Persépolis), saint-politain (Saint-Pol-de-Léon) Cf. aussi auscitain (Auch), gabolitain (Gévaudan), montacutain (Montaigu), panormitain (doublet de napolitain), quercitain (Le Quesnoy ou Quesnoy-sur-Deûle), rambolitain (Rambouillet) d) [t] est une consonne de transition apparaissant après certains termes à finale vocalique : arroutain (Arrou), broutain (Brou), samaritain (Samarie) Cf. aussi, avec var. de la voyelle : briotain (Briey) e) [t] est une consonne finale de la base après élimination de la voyelle finale : sacristain (sacristie), trinitain (Trinité-sur-Mer) 2. Consonne finale [k] a) [k] est la consonne finale prononcée de la base : américain (Amérique), armoricain (Armorique), dominicain (Dominique, Saint-Dominique), gouarecain (Gouarec), jamaïquain (Jamaïque), manoscain (Manosque), marocain (Maroc), médocain (Médoc), mexicain (Mexique), républicain (république), saint-affricain (Sainte-Affrique) b) [k] correspond aux graphèmes -c ou -g finals de la base : bourcain (Bourg-lès-Valence), port de boucain (Port-de-Bouc) c) [k] est une consonne de transition apparaissant après certains termes à finale vocalique : pierrefeucain (Pierrefeu-du-Var), valéricain (Saint-Valéry-sur-Somme) d) [k] est une consonne finale après élimination d'un suff. ou de la voyelle finale de la base : bocain (Bocage), porto-ricain (Porto-Rico) 3. Consonne finale [z] a) [z] est la finale de la base : briousain (Briouze), joyeusain (Joyeuse), lafrançaisain (Lafrançaise), syracusain (Syracuse), toulousain (Toulouse) Avec var. vocalique de la pénultième : diocésain (diocèse). b) [z] correspond au graphème -x final (non prononcé) de la base : bayeusain (Bayeux), rieupeyrousain (Rieupeyroux), vernousain (Vernoux-en-Vivarais) Avec variation de la voyelle finale : levrosain (Levroux) 4. Consonne finale [ʀ] a) [ʀ] est la consonne finale du terme de base : chartrain (Chartres), lesparrain (Lesparre-Médoc), saint-amourain (Saint-Amour), saint-pierrain (Saint-Pierre-d'Albigny), tourouvrain (Tourouvres) Cf. aussi, avec var. vocalique de la pénultième : [yε ʀ] > [ə ʀ-] : cerverain (Cervières) [uʀ] > [ɔ ʀ-] : borain (Bourg-Saint-Maurice), sanflorain (Saint-Flour) b) Avec articulation d'une consonne graph. -r de la base [yε ʀ] < [ye] : montpelliérain (Montpellier), moustiérain (Moustier-Sainte-Marie), moûtiérain (Moûtiers) c) Par insertion d'une consonne [ʀ] entre la finale [ə] de la base et le suff. -ain : aimerain (Aime), motterain (La Motte-Servolex) 5. Consonne finale [l] a) [l] est la consonne finale prononcée de la base : aiguebellain (Aiguebelle), albertvillain (Albertville), paimpolain (Paimpol) Avec var. vocalique de la pénultième : chapelain (Chapelle, La Chapelle-Saint-Luc) b) [əl] < [o], graph. -eau : châtelain (Château), pont-châtelain (Pont-Château) B.− Le suff. se combine, plus rarement, avec d'autres consonnes : écrivain, mondain, rifain, romain, urbain. Noter aussi a) L'apparition d'autres consonnes latentes : [ʃ] briochain (Saint-Brieuc), [s] cahorsain (Cahors) b) La substitution de -ain à diverses finales vocaliques ou termin. : aubain (Aubagne), cubain (Cuba) c) Les variations sav. ou pseudo-sav. de diverses bases : captylvain (Captieux), génovéfain (Saint-Geneviève-des-Bois), massylvain (Masseube)
Étymol. ET HIST. A.− Étymol. − Le suff. -ain1remonte à -anu(m). 1. Dér. de topon. Venant du lat. : africain < africanus, germain < germanus, romain < romanus, samaritain < samaritanus Venant de dér. en -politanus : constantinopolitain < constantinopolitanus, gabalitain < gabalitanus (Wolf 1964), gratianopolitain < gratianopolitanus (ibid.), métropolitain < metropolitanus, napolitain < napolitanus Cf. aussi antipolitain, inus. sur Antipol (1235) (ibid.), persépolitain, sur Persépolis Formés sur une base sav. attestée : aquisextain, inus. sur Aquae Sextiae (Aix-en-Provence) (ibid.) auscitain, sur Ausci (Auch) (ibid.) montacutain, sur Montem Acutem (Montaigu) (ibid.) mussipontain, sur Mussipontem (Pont-à-Mousson) (ibid.) quercitain, sur quercetum (Le Quesnay) (ibid.) rambolitain, sur Rambolitum (Rambouillet) (Dauzat 1964) romarimontain, sur Romarici Montem (Remiremont) (Wolf 1964) Rem. Certaines formations ne sont que des trad. ou reposent sur de fausses étymol. : bellifontain, qui n'est pas « fontaine belle eau », mais « fontaine de Bléaut » < Fontana Blitalda (Dauzat 1964) massylvain, sur *Mansus Silva (Masseube) (Wolf 1964) 2. Dér. de noms communs : châtelain < castellanus « habitant d'une forteresse » contemporain < lat. contemporaneus germain < lat. germanus « de frère, fraternel » humain < lat. humanus mondain < lat. eccl. mondanus « du monde » publicain < lat. publicanus sylvain < lat. silvanus (silvain) ultramontain < lat. eccl. ultramontanus urbain < lat. urbanus vilain < b. lat. villanus Cf. aussi, dér. d'un nom propre : franciscain < lat. eccl. franciscanus. Rem. 1. En a. fr., le suff. sav. -an correspondait à -ain : african, 1080/africain, xvieriveran, 1333/riverain, 1690 samarithan, 1330/samaritain Dans le Midi -anu(m) aboutit à -an à l'Est du Rhône, -a plus à l'Ouest (francisé en -ain) (Dauzat 1964). -ain remplace -en(c), suff. formateur d'adj. ethniques à partir de topon. (cf. Wolf 1964) : beaufortain remplace beauforten cahorsain (-in) remplace cahorsenc montpelliérain remplace mount-pelieren(c) moustiérain remplace moustiérenc toulousain remplace toulousenc -ain s'est substitué à -in : marraine < lat. pop. mātrīna, de mater; forme marrene, 1080 et marrine vers 1200; marraine est du xiiies. (Dauzat 1964) parrain < b. lat. patrinus; parin, parrin, refait d'apr. marraine au xvies. Rem. 2. Putain et nonnain sont, à l'orig., les cas régime de pute et nonne, d'une déclinaison s'appliquant essentiellement à des noms propres (noms de femmes : Alde/Aldain, Ale/Alain, Gisle/Gislain), d'animaux (fauve/fauvain, nom de jument ou d'ânesse), de fleuves (Meure/Morain, Orne/Ornain). Cette déclinaison est une trace de la déclinaison lat. -a/-ane, propre aux noms de femmes et à qq. noms de fleuves (cf. Nyrop t. 2 1936, § 242 et 250). Rem. 3. Capitaine vient du b. lat. capitaneus (Dauzat 1964). B.− Productivité 1. Dér. de topon. − Les ethniques datent surtout du début de la période du fr. moderne : 1556 américain 1588 mexicain xvieafricain xvienapolitain xviiegermain − Au xixes., on trouve : 1850 roumain, d'apr. romain 1869 cubain 1877 dominicain « de Saint-Dominique » mil. xixejamaïquain prob. fin du xixemarocain . Le suff. est en recul, au profit de -ien, -ais : avignonain est supplanté par avignonais (Meyer-L. t. 2 1966, § 38) domfrontain est supplanté par domfrontais (Wolf 1964) formosain est supplanté par formosan et formosien (Nyrop t. 3 1936, § 162) rochefortain (/rochefortin) est supplanté par rochefortais (Wolf 1964) . Le suff. -ain l'emporte (rarement) sur -ais ou -ien : pont-châtelain/pont-châtelais (Pont-Château) (Wolf 1964) sanflourain/saint-florien (Saint-Flour) (ibid.) valéricain/valéryquais (Saint-Valéry-sur-Somme) (ibid.) . La concurrence -ain/-in est due à l'homophonie des 2 suff. : aturain/aturin (Aire-sur-l'Adour) bayeusain/bayeusin (Bayeux) belfortain/belfortin (Belfort) borain/borrin (Bourg-Saint-Maurice) bourcain/bourquin (Bourg-lès-Valence) briochain/briochin (Saint-Brieuc) briotain/briotin (Briey) cahorsain/cahorsin (Cahors) carmausain/carmausin (Carmaux) lauzertain/lauzertin (Lauzerte) manoscain/manosquin (Manosque) montacutain/montacutin (Montaigu) murétain/murétin (Muret) mussipontain/mussipontin (Pont-à-Mousson) Cf. aussi, avec spécialisation sém. : marocain/maroquin « cuir du Maroc » 2. Dér. de noms communs. − Ils sont très anciens. xies. : 1090 vilain − xiies. : 1160 humain 1160 publicain vers 1170 germain 1190 chastelain fin xiiemondain − Au xives. et suiv. : 1335 urbain xivemétropolitain 1468 contemporain 1488 sylvain 1690 riverain remplace riveran « batelier », 1533 (Dauzat 1964) On ne relève qu'un nombre limité de formations fr. : 1190 chapelain, sur *chapelle (capelle en 1080) 1225 diocésain, sur diocèse (fin xiie) 1586 républicain