Police de caractères:

Surligner les objets textuels
Colorer les objets :
 
 
 
 
 
 

Entrez une forme

options d'affichagecatégorie :
ÉVEILLER, verbe trans.
A.− Faire sortir du sommeil. (Quasi-)synon. réveiller.
1. [Le suj. désigne une pers.] Il éveilla le dormeur en lui chatouillant le nez avec une paille (Zola, T. Raquin,1867, p. 65).J'ai demandé qu'on m'éveille à sept heures, mais dès 5 heures et demie prends mon parti de ne plus dormir (Gide, Journal,1932, p. 1128).Je l'ai accompagné jusque chez lui, 21, rue du Dragon; il a dû sonner plusieurs fois avant d'éveiller le portier (Martin du G., Souv. autobiogr.,1955, p. 81).
Emploi pronom. Sortir du sommeil. (Quasi-) synon. se réveiller.Le lendemain, Laurent s'éveilla frais et dispos. Il avait bien dormi (Zola, T. Raquin,1867p. 81).Je peux me réveiller quand je veux. Je me couche, je me dis : à sept heures, et je m'éveille à sept heures (Camus, Possédés,1959, 2epart., 6etabl., p. 1001):
1. ... je vais dormir un bout de temps; mais donnez-moi tout de même un quignon de pain, quelques fruits, du fromage. J'aurai peut-être envie de manger, cette nuit, si je m'éveille; car je m'éveille souvent, la nuit, et alors j'ai faim... Bosco, Mas Théot.,1945, p. 235.
P. anal. [Avec un compl. prép. de] Sortir (d'un état), abandonner (une façon d'être). S'éveiller de sa colère. Déjà de très jeunes gens s'éveillent du romantisme dur codifié par Sartre (Cocteau, Poés. crit. II,Monologues, 1960, p. 30):
2. ... un coup (...) l'envoya rouler sur l'herbe. (...) − je puis recommencer, si tu veux. Cette phrase parvint aux oreilles de Joseph comme à travers un brouillard et il lui sembla que, lentement, il s'éveillait d'un mauvais rêve. Green, Moïra,1950, p. 30.
Rem. 1. Pour Thomas 1956 ,,Éveiller, c'est tirer normalement du sommeil (...) Réveiller, c'est aussi éveiller, mais en faisant quelque effort inhabituel pour faire cesser le sommeil (...)``; pour Colin 1971 éveiller est ,,moins courant et plus littéraire que réveiller (...)``. 2. On relève ds la docum. a) la remarque suiv. : « M'avait réveillé » (je mettrais : éveillé) (Rivière, Corresp. [avec Alain-Fournier], 1907, p. 284). b) l'emploi arch. suiv. : «Pas tant de bruit, tu vas éveiller le Joseph. » (...). Joigneau ne répond pas. Il se fiche d'éveiller le gosse. Et le gosse se fiche d'être éveillé (Martin du G., Vieille Fr., 1933, p. 1017).
2. P. anal., emploi pronom. réfl.
a) [Le suj. désigne une partie du corps] Elle se mit debout, réveillée en sursaut par un grand frisson d'angoisse. (...) Son estomac s'éveillait, lui aussi, et la torturait (Zola, Assommoir,1877, p. 753).
b) [Le suj. désigne une ville, des éléments de la nature, avec une référence au matin] Ce matin-là Paris mettait une paresse souriante à s'éveiller (Zola, Page amour,1878, p. 846).Après le passage des premiers tramways, la ville s'éveille peu à peu, les premières brasseries ouvrent leur porte sur des comptoirs chargés de pancartes (Camus, Peste,1947, p. 1315):
3. Dès l'aube rougissante sur la campagne blême, entre Dôle et Pontarlier, le spectacle des champs qui s'éveillaient, le gai soleil qui se levait de la terre, − le soleil échappé comme eux de la prison des rues (...) des fumées grasses de Paris. Rolland, J.-Chr.,Antoinette, 1908, p. 904.
B.− Au fig.
1. Susciter la naissance de (quelque chose), ou le développement de (ce qui était latent, virtuel).
a) [Le compl. désigne un sentiment, une sensation, une faculté, une impression] Éveiller de vives douleurs. Quand un hasard éveille l'amour, tout s'ordonne dans l'homme selon cet amour, et l'amour lui apporte le sentiment de l'étendue (Saint-Exup., Pilote guerre,1942, p. 313).Le portrait du maréchal qui se trouvait à l'intérieur éveilla notre méfiance (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 133):
4. Je me suis persuadé que la plus belle mission que se puisse proposer un homme est celle de mendier son pain et d'éveiller ainsi les sentiments d'amour de compassion, de fraternité, qui sommeillent aux cœurs de nos semblables. Aymé, Cléramb.,1950, p. 177.
En partic. Éveiller des soupçons. Faire naître des soupçons. Être admis à toute heure, en tout lieu, dans l'intimité des plus jeunes et des plus jolies femmes, sans éveiller les soupçons d'un mari ou la jalousie d'un amant (Jouy, Hermite,t. 3, 1813, p. 218).Les amants tremblaient de commettre une imprudence, d'éveiller les soupçons, de montrer trop brusquement l'intérêt qu'ils avaient eu à la mort de Camille (Zola, T. Raquin,1867, p. 112):
5. ... il est mort (...) chez Marie Puech (...) Il avait installé Marie Puech rue du Cotentin, pour n'avoir pas à faire de trop grands trajets à pied. Il l'avait installée là, à deux pas de sa maison, au risque d'éveiller les soupçons de maman. Duhamel, Passion J. Pasquier,1945, p. 122.
Emploi pronom. Se développer. Son sens critique commençait à s'éveiller (Rolland, J.-Chr.,Antoinette, 1908p. 840).
En partic. [Le suj. désigne une pers.] Se développer, atteindre une certaine maturité. Mais vous savez bien ce que Balthazar disait : « Il s'éveille, cet enfant, il s'éveille » (A. Daudet, Arlésienne,1872, III, 4, p. 433).
b) [Le compl. désigne les manifestations de ces sentiments, sensations, etc.] Un livre éveille les idées, mais il n'éveille que les idées dont on a soi-même le germe : pour être complice de toutes les idées de Montesquieu, il faudrait avoir autant de génie que lui (Chênedollé, Journal,1833, p. 160):
6. ... la brusque sympathie qu'il témoignait à Renée devait faire pendant un mois l'étonnement de la concierge. La vie de Renée et de Gilbert éveillait les commérages du quartier. On ne savait s'ils étaient mariés. Arland, Ordre,1929, p. 326.
Emploi pronom. réfl. Apparaître, naître. Le mysticisme s'éveille. L'industrie s'éveille; les arts déjà connus s'étendent et se perfectionnent (Condorcet, Esq. tabl. hist.,1794, p. 5).L'anatomie s'éveille avec Vésale et ses élèves (Roussy dsNouv. Traité Méd.,fasc. 5, 2, 1929, p. 10).
En partic. Éveiller un écho. Déclencher, provoquer un (des) écho(s), (v. ce mot C). Elle éveillait en lui de lointains et profonds échos (Rolland, J.-Chr.,Maison, 1909, p. 1033).C'est curieux le nombre de gens chez qui la seule idée du nu éveille aussitôt des échos lubriques (Gide, Journal,1936, p. 1252).
Ne pas éveiller d'écho. Ne susciter aucune réaction :
7. La question des camps de travail en particulier va bouleverser l'opinion. Remarquez qu'elle avait été déjà soulevée avant la guerre (...) mais en ce temps nous n'éveillions guère d'écho. Beauvoir, Mandarins,1954, p. 295.
c) P. métaph. [Le compl. désigne un son] La vue d'une note imprimée sur la partition éveille en nous le son dont elle est le signe (Huyghe, Dialog. avec visible,1955, p. 433).
Emploi pronom. Se manifester, naître. De temps en temps un carillon ravissant s'éveillait dans la grande tour (...) ce carillon me faisait l'effet de chanter à cette ville de magots flamands je ne sais quelle chanson chinoise (Hugo, Fr. et Belg.,1885, p. 87).Un grondement s'éveille et meurt. Est-il ami ou ennemi? (Saint-Exup., Pilote guerre,1942, p. 341).
2. En partic. et p. métaph. Animer, tirer de l'indiffé rence ou du silence, stimuler. La nuit n'était pas venue (...) des rouliers allant à Senlis éveillaient par intervalle la solitude du carrefour (Gozlan, Notaire,1836, p. 180).Si l'on considère une période longue ou très longue, l'évolution de la technique éveille ou met en sommeil des régions successives (Perroux, Écon. XXes.,1964, p. 264).
Emploi pronom. Être stimulé. L'attention s'éveille. Les milieux politiques locaux, longtemps muets et résignés, s'éveillaient sous la tornade (De Gaulle, Mém. guerre,1956, p. 65).
3. Locutions
a) Éveiller un sentiment en qqn; éveiller de la déception, un espoir en qqn. Comment vous dire tout ce qu'éveille d'émotion en moi un article de vous? (Hugo, Corresp.,1872, p. 312).Son pire défaut est qu'elle n'éveille en vous aucune sympathie, qu'elle n'est femme en rien (Mirbeau, Journal femme ch.,1900, p. 27):
8. Antoine l'écoutait, sans l'interrompre; et cette attention intimidait un peu Jacques, mais le soutenait aussi, éveillait en lui un secret sentiment d'importance qui le rendait plus loquace. Martin du G.,Thib.,Sorell., 1928, p. 1216.
Emploi pronom. Apparaître, s'épanouir. D'ineffables aspirations s'éveillent en lui (Bachelard, Poét. espace,1957, p. 177):
9. Elle commença de se balancer un peu du buste, selon son habitude même sur une chaise droite. Ce mouvement semblait l'aider à réfléchir. Un projet s'éveilla bientôt en elle. Toujours active à penser, dès qu'elle concevait un plan, elle le poursuivait inlassablement. Roy, Bonheur occas.,1945, p. 110.
En partic. [Le compl. désigne une pers. ou un personnage typique] Faire naître, donner l'existence, susciter :
10. Alors elle levait son doigt d'une façon charmante (...) et elle ne savait dire que ce seul mot : « papa », ce mot qui éveillait en lui un être nouveau, et faisait surgir dans son cœur un monde inconnu de tendresses. Moselly, Terres lorr.,1907, p. 280.
Emploi pronom. Il y eut un nouveau silence. Le médecin s'éveillait en lui. Il compta les pulsations (Zola, Page amour,1878, p. 930).Le poète s'éveille dans l'homme par un événement inattendu, un incident extérieur ou intérieur : un arbre, un visage, un « sujet », une émotion, un mot (Valéry, Variété V,1944, p. 160).
b) Éveiller (qqn) à (qqc.).Ouvrir à, faire s'épanouir à. Une jeune femme un peu lourde, qui avait des vapeurs, difficile à éveiller au plaisir, et toujours insatisfaite (Guéhenno, Jean-Jacques,1948, p. 69):
11. Deux ans plus tôt, pour m'éveiller à l'humanisme, il m'avait exposé des idées dont il ne soufflait plus mot, de crainte d'encourager ma folie mais qui s'étaient gravées dans mon esprit. Elles reprirent, sans bruit, leur virulence... Sartre, Mots,1964, p. 147.
Emploi pronom. S'ouvrir à quelque chose, en prendre une première connaissance. Adam s'éveille à la vie; ses yeux s'ouvrent; il ne sait d'où il sort (Chateaubr., Génie,t. 1, 1803, p. 285).L'Italie s'était éveillée la première à la science et à la beauté (France, Rabelais,1909, p. 8):
12. Raymond, la victime, réagissait peu à peu, s'éveillait à la souffrance, au dépit, à une colère qu'il ne pouvait manifester... Arnoux, Crimes innoc.,1952, p. 145.
SYNT. Éveiller la convoitise, la cupidité, la défiance, le désir, l'instinct, l'intérêt; éveiller des résonances.
Prononc. et Orth. : [evεje] ou [eveje], (il s')éveille [evεj]. Enq. : /evej/ (il) éveille. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. Ca 1100 « tirer du sommeil, ici pronom. » (Roland, éd. J. Bédier, 724); 2. 1160-70 pronom. « sortir de l'indifférence, de l'engourdissement » (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, II, 2728). Du lat. vulg. *exvigilare, réfection du lat. class. evigilare « s'éveiller ». Fréq. abs. littér. : 4 183. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 4 349, b) 6 389; xxes. : a) 6 749, b) 6 593. Bbg. Gohin 1903, p. 344.