| ÉPICIER, IÈRE, subst. A.− Personne qui fait commerce d'épicerie, qui tient une épicerie. Un petit, un gros épicier; l'épicier du coin; un épicier en gros, de détail; un épicier détaillant. L'étalage d'un épicier-fruitier (Romains, Hommes bonne vol.,1938, p. 213).Marguerite continuait à m'expliquer comment la dorlotait feu sa mère, jadis épicière... Oh! épicière! Quel dommage! Marguerite appartenait donc à une des classes les plus viles de la société (Bazin, Vipère,1948, p. 151).L'épicier est redouté pour sa malhonnêteté (il triche sur les pesées et sur la qualité) et très méprisé (Lesourd, Gérard, Hist. écon.,1966, p. 383): 1. Il entra chez l'épicier : le patron, le garçon, deux ménagères et un gamin : « Nous disons ... un litre de pétrole... » ... « Je vous les donne en boîte, ou à la livre? » ... « Maurice, attrape-moi les éponges à 0,95. »
Romains, Hommes bonne vol.,1932, p. 130. − En appos. avec valeur d'adj., vx. Marchand épicier. Je suis entré chez une petite marchande épicière qui m'a vendu du raisin sec (Stendhal, Mém. touriste,t. 1, 1838, p. 29). ♦ Commis épicier, garçon épicier. Je m'arrêtai à Anvers où je trouvai une place de garçon épicier (France, Crainquebille,Juges intègres, 1904, p. 241). B.− Vieilli. Personne à l'esprit étroit, vulgaire, sans goût artistique. Synon. bourgeois.Ses amis s'étaient moqués de lui. Mannheim le traita d'épicier (Rolland, J.-Chr.,Révolte, 1907, p. 486).Un duc peut écrire des romans d'épicier, même sur les mœurs du grand monde, (...) et l'épithète d'aristocratique être méritée par les écrits d'un plébéien (Proust, Guermantes1, 1920, p. 236): 2. ... un théâtre qui soumet la mise en scène et la réalisation, c'est-à-dire tout ce qu'il y a en lui de spécifiquement théâtral, au texte, est un théâtre d'idiot, de fou, d'inverti, de grammairien, d'épicier, d'anti-poète et de positiviste, c'est-à-dire d'occidental.
Artaud, Le Théâtre et son double,1939, p. 50. − Emploi adj. D'épicier. C'est épicier. Il lui fallait une passion, non une passion épicière et bourgeoise, mais une passion d'artiste (Gautier, Jeunes-Fr.,1872, p. 98).C'est une vérité pure qui aura bien du mal à s'établir dans les caboches épicières et utilitaires de nos contemporains (Flaub., Corresp.,1876, p. 322). Rem. On rencontre ds la docum. épicièrement, adv. Cet éternel Puy-de-Dôme, dont le cône bleu ressemble si épicièrement à un pain de sucre enveloppé de son papier (Goncourt, Journal, 1867, p. 364). Prononc. et Orth. : [episje], fém. [-sjε:ʀ]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1223 espiciere « celle qui tient un commerce d'épicerie » (G. de Coinci, Les Miracles de Nostre Dame, éd. F. Kœnig, I Mir 44, 473 : la riche dame, l'espiciere qui a en sa riche aumosniere Tante espece fresche et novele); 1241 li espiciers (Ban de tréf., Bib. Metz ds Gdf. Compl.). Dér. de épice*; suff. -ier*, -ière*. Fréq. abs. littér. : 686 (épicier-fruitier : 2). Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 682, b) 1 563; xxes. : a) 1 406, b) 650. Bbg. Mat. Louis-Philippe 1951, p. 67, 76, 234. |