| ÉGOÏSTE, adj. et subst. A.− Vieilli [Correspond à égoïsme A; en parlant d'une pers.] Synon. de égocentrique, égotiste.La réputation d'égoïste qu'on a voulu faire à ce philosophe [Montaigne] a le même fondement que sa gloire. On a blâmé, en les admirant, ces Essais, où il entretient ses lecteurs de sa personne, de ses goûts, de ses maladies, de ses vertus et de ses défauts (Jouy, Hermite,t. 5, 1814, p. 92). B.− Cour. [Correspond à égoïsme B; en parlant d'une pers. ou de son comportement] Qui n'est occupé que par son intérêt ou son plaisir propre. Un bonheur, un calcul égoïste; vivre en égoïste; se conduire en égoïste. Un désir égoïste de possession et de domination (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 299): 1. Pauvre Deschartres! il avait contrarié sa nature et sa destinée en cessant de vivre pour l'amitié. Il s'était cru égoïste, il s'était trompé : il était incapable de vivre pour lui-même et par lui-même.
Sand, Histoire de ma vie,t. 4, 1855, p. 6. SYNT. Une ambition, un aplomb, un bien-être, une indifférence, une quiétude, une souffrance, une tranquillité égoïste; un mobile, un motif, un sentiment égoïste. − P. ell., emploi subst. : 2. ... je resterai vieux garçon et je deviendrai un vieil égoïste. Je n'aimerai que moi, je me donnerai des chaînes de montre à ma fête et des tabatières au jour de l'an. Je m'abonnerai chez Vachette, et je mangerai tout seul comme un goinfre. Le soir, j'irai digérer tout seul dans une stalle des variétés; et un beau jour, je mourrai tout seul d'une apoplexie de truffes et de champagne.
Barrière, Capendu, Les Faux bonshommes,1856, p. 140. ♦ Expr. Un ou une égoïste à deux. Ce jeune héros clairvoyant est bien obligé de reconnaître qu'il n'est pas adapté de tous points à l'amour de cette sublime égoïste à deux. Alors, que doit-il faire? Sera-t-il honnête s'il accepte une communion où il apporte moins que son amie? (Barrès, Renan,1888, p. 79). − P. anal. [Le suj. désigne un groupe de pers., une nation, etc.] La Touraine ne cessera plus d'être ce qu'elle est : la plus égoïste province du plus égoïste et du plus heureux des pays (Morand, Eur. gal.,1925, p. 159). C.− Emplois spéc. 1. Vx, PHILOS. Synon. de solipsiste (cf. égoïsme C 1). Rem. Attesté ds qq. dict. gén., surtout au xixesiècle. 2. PSYCHANAL. Qui se rapporte au moi tel qu'il apparaît dans le rêve. Nous plaçant cette fois au point de vue de la théorie de la libido, nous déduisons que le sommeil est un état dans lequel toutes les énergies, libidineuses aussi bien qu'égoïstes, attachées aux objets, se retirent de ceux-ci et rentrent dans le moi (Freud, Introd. psychanal.,1959, p. 446). 3. PSYCHOPHYSIOL., sans nuance péj. [S'oppose à altruiste] Instincts, penchants égoïstes. Cf. égoïsme C 3.L'unité altruiste n'exige point, comme l'unité égoïste, l'entier sacrifice des penchants contraires à son principe, mais seulement leur sage subordination à l'affection prépondérante (Comte, Catéch. posit.,1852, p. 49). Rem. On rencontre ds la docum. l'adv. égoïstement qui désigne l'aspect égoïste (au sens cour.) d'une action, d'un comportement, d'une manière d'être. Tu seras pauvre, parce que tu as voulu être riche égoïstement (Leroux, Humanité, t. 2, 1840, p. 568). Il voulait jouir égoïstement de la vie (Camus, Homme rév., 1951, p. 195). Prononc. et Orth. : [egɔist]. Ds Ac. 1762-1932. Étymol. et Hist. Av. 1698 (La Bruyère d'apr. Lar. Lang. fr.); 1755 (Encyclop. t. 5 : On appelle ainsi cette classe de philosophes qui ne reconnoissent d'autre vérité Que celle de leur propre existence); 1762 (Ac. : Celui ou celle qui a le vice, ou qui suit la doctrine de l'égoïsme); 1793 « qui subordonne l'intérêt d'autrui à son propre intérêt » (Laya, Ami loix, III, 3, p. 51). Dér. du lat. ego « moi »; suff. -iste*. Fréq. abs. littér. : 1 253. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 679, b) 2 175; xxes. : a) 1 922, b) 1 574. Bbg. Hasselrot 20es. 1972, p. 14. |