SUBTIL, -ILE, adj.
Étymol. et Hist. I. Concr.
1. a) 1
ertiers
xiies. fr.-prov. « mince, fin, élancé » en parlant d'une partie du corps
lo bu subtil (
Alberic de Pisançon,
Alexandre, 70, éd. Elliott Monographs, 38, p. 40). 1505
fueilles de blete subtiles et serrees (
Desdier Christol,
Platine, fol. 70 r
oa d'apr. R.
Arveiller ds
Mél. Séguy (J.), t. 1 1978, p. 72,
s.v. lymonion); 1559
lames [
d'espees]
tenves et subtiles (
Amyot,
Camille, 41 ds
Hug.);
b) 1409
galee soubtille « galère de combat de forme allongée » (
Bouciquaut,
Livre des fais, III, XX, éd. D. Lalande, p. 373, 109); 1507
gallères subtilles (
Ordonn. royale ds
Fennis Stolon., p. 502);
2. ca 1200 [ms.] « (d'un ouvrage) fait avec art » ici, empl. adv. (
Benedeit,
St Brendan, éd. E. G. R. Waters, 1077: De or precius uvret
subtil, leçon ms. B);
3. Déb.
xiiies. « composé d'éléments déliés, ténus, impalpables, volatils » (
Expl. du Cant. des cant., ms. du Mans 173, éd. C. E. Pickford, 1727, 2117); 1552
feu suttil (
Baïf,
Francine, l. III [I, 213] ds
Hug.); 1
erquart
xviies.
air sutil (
D'Aubigné,
Création, chant I ds
Œuvres, éd. E. Réaume et Fr. de Caussade, t. 3, p. 327); 1647
l'agitation de la matiere subtile (
Descartes,
Principes de la philos., IV, Paris, H. Le Gras et E. Pepingué, 1651, p. 295);
4. a) xves. [ms.] « fin, ténu, léger »
drap subtil (
Franchières,
Fauc., ms. Chantilly 1528, fol. 22 r
ods
Gdf.); 1534
subtile toilette empl. p. image (
Cl. Marot, trad.
Métamorphoses d'Ovide, I, 1085 ds
Œuvres. Traductions, éd. C. A. Mayer, p. 157);
b) 1546 « transparent, léger » (d'une lampe de cristal)
ouvrage tant diaphane et subtil (
Rabelais,
5eLivre,, XLI, éd. J. Plattard, p. 154);
5. a) 1588 [1591]
mal subtil « espèce de maladie des faucons » (Ch.
Estienne et
Jean Liébault,
Agric. et Maison rustique, Lyon, J. Guichard, p. 392 a);
b) 1578-1583 « de nature à pénétrer, à s'insinuer »
humeur suptil;
sang subtil ``(
D'Aubigné,
Printemps, t. 3, p. 116;
Création, XI, t. 3, p. 409).
II. Abstr.
A. en parlant d'une chose
1. a) fin
xiies. « qui présente des finesses difficiles à saisir » (
Sermons de St Bernard, éd. W. Foerster, p. 99, 22);
ca 1200 (
Moralium in Job, éd. W. Foerster, p. 340);
b) 1580 « qui échappe à l'intelligence par un excès de finesse » (
Montaigne,
Essais, I, XXX, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, p. 197: c'est une
subtile consideration de la philosophie); 1656 (
Pascal,
Provinciales, I ds
Œuvres, éd. J. Chevalier, 1964, p. 670: La difference qui est entre nous [docteurs de Sorbonne et Jansénistes] est si
subtile, qu'à peine pouvons-nous la marquer);
2. 1360-70 « qui suppose de l'esprit, de l'adresse »
tour subtil (
Baudouin de Sebourc, éd. De Bocca, chant II, 582, t. 1, p. 49); 1549 (
Est.: ceste exposition est
subtile [
habet acumen]).
B. En parlant d'une pers.
1. a) fin
xiies. « fin d'esprit, qui perçoit les finesses délicates à saisir » (
Sermons de St Bernard, p. 99, 24: ceos cuers ki poc sunt ancor
subtil); 1576
sens subtil (
Baïf,
Mimes, l. II V, 65 ds
Hug.); 1580
esprit subtil (
Montaigne,
op. cit., II, XII, p. 465);
b) 1470 (en parlant d'un organe sensoriel) « qui perçoit finement » [
oye]
subtile (
Georges Chastellain,
Vérité mal prise ds
Œuvres, éd. Kervyn de Lettenhove, t. 6, p. 264);
2. a) fin
xiiies. « doué, habile, ingénieux » (
Jean de Meun,
Testament, 1433 ds
Rose, éd. D. M. Méon, t. 4, p. 73: Nous sommes trop
soubtilz es choses de cest monde En congnoistre, en acquerre...); 1544 en mauvaise part
filous subtils (
D'Ouville,
Contes, I, p. 245 ds
Livet Molière);
b) fin
XIVes. « habile dans son métier »
paintre subtil (
Eustache Deschamps,
Œuvres, éd. Queux de St-Hilaire, MCCCCXCV, 2315, t. 8, p. 318). Adapt. progressive, d'apr. l'étymon lat., de l'a. fr.
sotil (déb.
xiies. « [d'un ouvrage] fin, fait avec art » empl. adv.
Benedeit,
op. cit., 1077;
ca 1150
Thèbes, éd. G. Raynaud de Lage, 5001; 1176-81 « [d'une personne] d'esprit fin, délié »
Chrétien de Troyes,
Chevalier de la charrette, éd. M. Roques, 3144; 1246 « [d'une chose] difficile à saisir »
Gautier de Metz,
Image du monde, 485, 25 ds T.-L.), issu du lat.
subtilis « fin, menu, délié; fin, délicat, pénétrant (en parlant du goût, du jugement); simple, sobre (en parlant du style) »;
cf. la var. a. fr.
sotif (par confusion entre les dés. en
-iz, -is communes aux cas suj. masc. sing. et régime masc. plur. des suffixés en
-ile et en
-ivus):
ca 1150 « caché, dissimulé »
posterne soutive (
Thèbes, 1489), fin
xiies. [ms.]. « fin, fait avec art »
enlacëure soutive (
Partonopeus de Blois, éd. M. Gildea, append. I, 10310). I1b représente peut-être un calque de l'ital.
(galea) sottile ou du cat.
(galera) sotil, v.
Fennis Stolon., pp. 503-504.