ALLIGATOR, subst. masc.
Étymol. ET HIST. − 1663 « crocodile d'Amérique » (
Relat. de voy. de Perse et des Indes orientales, trad. de l'angl. de Th. Herbert par M. de Wicquefort, 507 [local. : Sumatra] ds
König 1939 : Nos matelots appellent le crocodile
alligator, improprement, et tiré du mot
allegardos qui est composé de l'espagnol et de l'allemand); 1684 «
id. » (
Rec. de div. voy. faits en Afr. et en Amer., publ. par Thévenot,
Relat. de la Jamaïque, 11,
ibid. : ces animaux que les Espagnols nomment
alligabor); «
id. » ds relations de voyage jusqu'à 1751,
Encyclop. t. 1.
Empr. à l'angl.
alligator «
id. », lui-même empr. à l'esp. d'Amér.
el lagarto, elargato par agglutination de l'art. « le caïman » (1565,
Aguado,
Hist. de Venezuela, I, 694 ds
Fried. 1960,
s.v. alligator : temiendo los muchos lagartos o caimanes [...; ...] en el hiziese presa elargato); pour les formes de l'esp.
(el) lagarto ayant contribué à l'évolution phonét. lors de l'empr. par l'angl., voir
Griera,
Anuari de l'oficina Romànica de Lingüistica i Litèratura, t. 1, p. 36.
Angl. attesté dans relations de voyage et descriptions du Nouveau Monde, sous différentes formes reflétant l'évolution phonét.
a) mot cité comme étranger, trad. par
cayman, crocodile : 1568
lagarto, 1591
aligartos, 1593
alagartoes ds
NED. b) 1663
aligator (
Cowley,
A vision concerning Cromwell the wicked, 71,
ibid. : He must have his prey of the whole Indies both by sea and Land, this great Aligator); 1682
alligator (
Ash,
Carolina, 32 ds
DAE 1938 : a creature called alligator or crocodile, whose scaly back is impenetrable); compte tenu des formes altérées esp.
(supra) et des transformations successives du mot en angl., le recours à une influence du lat.
alligare (
Bl.-W.5) est inutile; tout au plus un rapport avec
alligare ou avec
allicere peut être évoqué par étymol. second. L'esp. d'Amér. est la transposition à la faune tropicale de l'esp.
(el) lagarto « (le) lézard », attesté comme subst. dep.
xiiies. (
Cor.). Les formes hisp. (esp.; port.
lagarto, xies.; cat.
llangardei, xives.) supposent une var. lat. *
lacartus pour
lacertus « lézard » (lézard*), i-, e − > − a, peut-être par assimilation progressive à la faveur d'un accent d'intensité portant sur syllabe initiale à l'époque prélittér. (W. Meyer ds
Z. rom. Philol., t. 11, p. 255). Du fr.
alligator, l'esp. mod.
aligator, (Al. 1958,
s.v.).
Bonn. 1920, p. 2;
Boulan 1934, p. 99;
Brunot t. 6, 2
epart., p. 1234;
Mack. t. 1 1939, p. 84; Barbier ds
Mod. Lang. R., t. 16, p. 256;
König 1939, p. 13;
Fried. 1960, p. 48.