| MIGNARDISE, subst. fém. A. − Littér. Qualité de ce qui est mignard. Quel contraste entre sa grosse voix et la mignardise de ses traits. Elle a un nez fait pour des mouchoirs au point d'Alençon (Morand,Eau sous ponts,1954, p.201): 1. Un matin, comme il était étendu sur le sable, tout occupé à regarder les femmes sortir de l'eau, un petit pied l'avait frappé par sa gentillesse et sa mignardise.
Maupass.,Contes et nouv.,t.1, Enf., 1882, p.680. B. − Affectation exagérée de gentillesse et de délicatesse. Mignardise de style. Sa voix, autrefois gâtée par la mignardise et l'afféterie, s'échappait pure et limpide (Sandeau,Sacs,1851, p.61): 2. Amiel n'avait pas le goût très sûr: on le sent souvent à la qualité des images, et il n'est pas de signe qui trompe moins: ces paysages en particulier sont gâtés fréquemment par une afféterie et une mignardise qui prouvent qu'il avait trop étudié, ainsi que le lui reprochait Schérer, «la catégorie du joli».
Du Bos,Journal,1921, p.13. ♦ BEAUX-ARTS. ,,Se dit, dans une oeuvre d'art, d'une exécution où se font trop sentir l'afféterie, l'affectation, la recherche de la grâce, d'un modèle d'une délicatesse, d'une douceur excessives, d'un fini exagéré`` (Adeline, Lex. termes art, 1884). La pratique du pinceau ne doit jamais tomber dans la fade et froide mignardise d'un Mignard, ni dans le faire insipide et blaireauté d'un Carlo Dolci (Ch. Blanc, Gramm. arts dessin,1876, p.578). − P. méton. Manières, gestes ou paroles traduisant une certaine tendresse. Mathilde (...) est passée dans sa chambre où elle couche le petit en lui débitant des mignardises (H. Bazin,Lève-toi,1952, p.236): 3. Plus loin sont deux amants; on en juge par l'empressement de l'un, les petites mignardises de l'autre et la gourmandise de tous les deux. Le plaisir brille dans leurs yeux; et par le choix qui préside à la composition de leur repas, le présent sert à deviner le passé et à prévoir l'avenir.
Brillat-Sav.,Physiol. goût,1825, p.286. ♦ Péj. Manières, gestes ou paroles caractérisés par l'affectation et le manque de naturel. C'est surprenant! Elle sort du couvent et n'est point corrompue jusqu'aux moelles (...) elle a passé entre les mignardises perverses des petites amies et les sensuelles chatteries des soeurs, candide, toute fraîche. Voilà qui me déroute (Renard,Écorn.,1892, p.230). C. − [P. anal., pour désigner des objets délicats] 1. BOT. Espèce de petits œillets vivaces à l'odeur délicate et aux teintes pastel dont on garnit les plates-bandes des jardins. Une matinée de juin (...) fanait (...) le lac de myosotis bleus entre ses margelles de mignardises roses (Colette,Fin Chéri,1926, p.30).V. aussi mignonnet B 4. − En appos. Par moments, ils disparaissaient jusqu'aux chevilles dans la soie mouchetée des silènes roses, dans le satin panaché des œillets mignardise (Zola,Faute Abbé Mouret,1875, 1348). 2. MODE. Soutache enjolivée servant à garnir les robes, les vêtements. Passer de longues soirées dans un boudoir, sous la lampe, à l'exemple de jeunes Soreloises, à travailler la mignardise, la frivolité ou à tirer l'aiguille à petits points, lui avait paru longtemps la plus enviable destinée (Guèvremont,Survenant,1945, p.50). 3. PÂTISS. Petits gâteaux servis à la fin du repas (avec le café et les liqueurs le plus souvent). Le menu (...) se poursuit avec les rouelles de langouste en vinaigrette de piment doux, une darne de saumon grillé au cresson (...), une petite soupe de fruits rouges et ses sorbets et enfin le café et les mignardises (Nouv. guide Gault-Millau,juill. 1984,p.V). Prononc. et Orth.: [miɳaʀdi:z]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1539 «gentillesse mignonne» (Est.); 2. 1567 «recherche excessive, manque de naturel» (Philibert Delorme, De l'Architecture, f. 23 vo); 1696 «affectation de gentillesse, délicatesse» (La Bruyère, Caractères, éd. G. Servois, t.2, p.85); 3. 1660 «œillet» (Oudin Fr.-Esp.); 4. 1868 «galon» (Littré). Dér. de mignard*; suff. -ise*; cf. la forme mignotise att. dès la fin du xiiies. (ca 1280 Girart d'Amiens, Escanor, 20090 ds T.-L.: mingnotise «coquetterie»). Fréq. abs. littér.: 40. Bbg. Breslin (M. S.). The Old Fr. abstract suffix -ise. Rom. Philol. 1969, t.22, p.419. _ Duch. Beauté 1960, pp.167-168. _ Migl. Nome propr. 1968 [1927], p.229. |