| * Dans l'article "MASSACRER,, verbe trans." MASSACRER, verbe trans. A. − 1. Tuer avec sauvagerie et en grand nombre des êtres qui ne peuvent se défendre. Synon. exterminer.Massacrer des enfants, des femmes, des orphelins, des prisonniers, des vaincus. Barbares, ces hommes que vous allez massacrer sont vos frères, ils sont innocents, ils sont opprimés (Marat,Pamphlets, Affreux réveil, 1790, p.243).Des milliers de bêtes sont massacrées inutilement, chaque jour, sans l'ombre d'un remords (Rolland,J.-Chr., Buisson ard., 1911, p.1412): 1. Nous gardons le souvenir d'une guerre atroce qui a fait des milliers, des dizaines de milliers, des centaines de milliers, des millions de victimes parmi nos frères, qui furent massacrés par les bourreaux fascistes...
Déclar. univ. Dr. Homme, 1949, p.12. ♦ Emploi abs. On a pillé, saccagé, brûlé, massacré pour la gloire de l'Évangile (Clemenceau,Iniquité, 1899, p.181). ♦ Emploi pronom. réciproque. C'est assez pour exciter l'animosité des Arabes, et fournir aux Anglais une bonne raison d'occuper une contrée où tout le monde se massacrerait s'ils n'y faisaient pas la police (Tharaud,An prochain, 1924, p.169). − Part. passé en emploi subst. On se demandait si c'était (...) un massacré de septembre, noble ou prêtre, oublié dans une cave du voisinage (A. France,Dieux ont soif, 1912, p.71).On empile dans des charrettes les cadavres des massacrés (Faure,Hist. art, 1921, p.140). 2. P. ext. Tuer avec sauvagerie, d'une manière particulièrement odieuse. Synon. abattre, assassiner, égorger.Plus de deux cents Indiens le massacrèrent sur-le-champ, à coups de massue et de pierres (Voy. La Pérouse, t. 3, 1797, p.199).On venait de massacrer les consuls de France et d'Allemagne (...) de graves événements semblaient se préparer (Loti,Mariage, 1882, p.291): 2. Celui-là, c'est un coeur de marbre qui ne connaît que la consigne et qui massacrerait père et mère en criant: «Vive le tsar!»
G. Leroux,Roul. tsar, 1912, p.38. − Emploi pronom. ♦ réfl. Si tu dis un seul mot, mon roi, je me massacre (Hugo,Théâtre en lib., 1885, p.217). ♦ réciproque. Ah! la malheureuse! murmura alors la jeune femme, quand on pense que deux hommes vont se massacrer pour elle! À sa place, je n'en dormirais plus (Zola,Pot-Bouille, 1882, p.296). 3. En partic. Abattre au jeu de massacre. Anatole massacra un monsieur bien mis, et après avoir raté les autres, il s'en fut, vexé d'être traité de maladroit par sa maîtresse (Huysmans,Soeurs Vatard, 1879, p.80). B. − 1. P. exagér. [Le compl. d'obj. désigne une pers.] Mettre à mal en faisant preuve de brutalité (généralement une personne en état d'infériorité). Synon. brutaliser, malmener; (fam. et pop.) amocher, démolir, esquinter, éreinter.Quand il revenait soûl, il lui fallait des femmes à massacrer. Il ne s'apercevait seulement pas que Lalie était toute petite; il n'aurait pas tapé plus fort sur une vieille peau (Zola,Assommoir, 1877, p.689).Le public américain (...) idolâtrait Ram et son terrible punch. Ram saurait bien massacrer n'importe quel Européen de sa catégorie (Morand,Champions du monde, 1930, p.115). ♦ Emploi pronom. réciproque. Pendant près de trois ans, le ménage s'était massacré: puis, un soir de moisson, la gueuse s'en était allée comme elle était venue (Zola,Terre, 1887, 46). − Au fig. Massacrer qqn de qqc.Accabler. Synon. tuer; (fam. et pop.) crever, esquinter, éreinter.Elle le traitait en vraie bête, tapant sur lui, le massacrant d'ouvrage, abusant de sa force de brute (Zola,Terre, 1887, p.380).Continuez à me massacrer de douleur. Encore un peu de cette déchirante musique et je me fais sauter la cervelle jusque sur votre couverture (Audiberti,Mal court, 1947, ii, p.159). 2. [Le compl. d'obj. désigne une chose] a) [Le suj. désigne une pers.] − Abîmer, détruire avec brutalité, avec violence. Synon. détériorer, saccager, bousiller (fam. et pop.).Il lui semblait piétiner des roses, massacrer des choses précieuses par rage qu'elles ne fussent pas à lui, déchirer des émotions inretrouvables (Malègue,Augustin, t. 2, 1933, p.93). ♦ Emploi pronom. réfl. indir. [Elle allait] se massacrer les mains au grenier, à fourrager parmi les vieilles caisses (Montherl.,Pitié femmes, 1936, p.1086). − Gâter de façon irréparable. Synon. détruire, saccager.Cette vie est trop courte pour que nous la massacrions de vains regrets (Loti,Journal, 1878-81, p.38).Ils finissent, après avoir ainsi eux-mêmes massacré leur espace vital, par nier leur propre existence (Mounier,Traité caract., 1946, p.305). ♦ Part. passé en emploi adj. Étienne regardait fixement ce sein énorme, dont la blancheur molle tranchait avec le teint massacré et jauni du visage (Zola,Germinal, 1885, p.1330). − En partic. Gâter involontairement par un travail maladroit ou brutal, par une interprétation ou une exécution très mauvaise. Synon. défigurer.Massacrer un air, une partition, un rôle. Chabran commença à massacrer sur son harmonium un andante de Haydn (Rolland,J.-Chr., Maison, 1909, p.1038).Pour faire exister dans sa vérité un morceau de musique, il fallait en rendre les nuances et non le massacrer (Beauvoir,Mém. j. fille, 1958, p.70). ♦ [P. méton. du compl.] Un poète symboliste lit à un de ses amis la description d'une maîtresse. − Est-il possible, s'écrie l'ami, de massacrer ainsi une femme! (Renard,Journal, 1892, p.109). b) [Le suj. désigne une chose] − Causer des dommages irréparables à quelque chose. Tant de précieux palimpsestes ont été massacrés par des réactifs barbares (L'Hist. et ses méth., 1961, p.1106). − Gâter de façon irréparable. Elle se faisait remarquer par une beauté régulière, correcte, massacrée par les travaux qui, dès l'enfance, la courbèrent sur des tâches pénibles (Balzac,Pts bourg., 1850, p.23).Toute joie tomberait désormais pour lui sur une âme saccagée, sur un avenir massacré par cette double mort (Malègue,Augustin, t. 2, 1933, p.332). Prononc. et Orth.: [masakʀ
̭e], (il) massacre [masakʀ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) ca 1160 «tuer en frappant avec acharnement» maceclés (Moniage Guillaume, 1674 ds T.-L.); 1306 masacrez (Guillaume Guiart, Royaux Lignages, I, 110, éd. J. A. Buchon); b) 1564 «tuer, égorger en masse des hommes ou des animaux qui ne se défendent point» (Thierry); c) 1630 «tuer quelqu'un qui ne peut se défendre» (D'Aubigné, Vie, XXVIII ds Littré); d) 1690 «couvrir de blessures» (Fur.); 2. 1642 «faire très mal une besogne» (Oudin, Seconde part. des Recherches ital. et françoises, p.360). D'un lat. pop. *matteuculare, dér. gallo-rom. de *matteuca (v. massue), hyp. de E.Poppe ds FEW t. 6, 1, p.517a. Fréq. abs. littér.: 831. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 1269, b) 1340; xxes.: a) 1300, b) 947. DÉR. Massacreur, -euse, subst. et adj.a) (Personne) qui massacre. On a vu les massacreurs de septembre massacrer l'un d'entre eux pour avoir volé durant leurs exécutions (Las Cases,Mémor. Ste-Hélène, t. 2, 1823, p.38).Nous sommes (...) avec les derniers païens contre les évêques massacreurs (Clemenceau,Vers réparation, 1899, p.320).La nature, massacreuse des individus en même temps que génératrice des espèces (Bergson,Deux sources, 1932, p.297).b) (Personne) qui détruit, gâche. Les niveleurs et massacreurs de toute royauté (Sainte-Beuve,Nouv. lundis, t. 5, 1863, p.422).Un esprit de sectaire, un massacreur de facultés (Baudel.,Curios. esthét., 1855, p.153).En partic. Synon. de massacre.Cet ouvrier est un véritable massacreur (Ac.1935).− [masakʀoe:ʀ], fém. [-oz]. Att. ds Ac. dep. 1798. − 1resattest. a) 1574 «personne qui accomplit un massacre» (J. de Léry, Hist. de Sancerre, p.203 ds DG), b) 1834 «personne qui gâte un ouvrage» (Land.); de massacrer, suff. -eur2*. − Fréq. abs. littér.: 25. |